Crise ukrainienne
Blinken exhorte Lavrov à retirer les troupes russes de la frontière

Les Etats-Unis ont reconnu mardi avoir échoué à obtenir l'engagement de la Russie en faveur d'une désescalade imminente à la frontière ukrainienne, mais les chefs de la diplomatie des deux puissances rivales semblent vouloir poursuivre leur dialogue.
Publié: 01.02.2022 à 19:59 heures
Un militaire ukrainien secoue la neige d'une effigie criblée de balles du président russe Vladimir Poutine, dans l'est de l'Ukraine, mardi.
Photo: Vadim Ghirda

Pendant que le secrétaire d'Etat américain Antony Blinken et le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov se parlaient à nouveau au téléphone pour tenter de désamorcer cette crise à hauts risques qui risque de dégénérer en guerre en Europe, le président russe Vladimir Poutine recevait le premier ministre hongrois Viktor Orban, son allié pourtant membre de l'Union européenne et de l'Otan, dans une forme de pied de nez destiné à montrer une certaine division dans le camp occidental.

Antony Blinken a «exhorté la Russie à une désescalade immédiate et au retrait des troupes et de l'équipement à la frontière de l'Ukraine», a déclaré le département d'Etat américain après leur appel téléphonique. Il a aussi «exhorté la Russie à emprunter la voie diplomatique» plutôt que le conflit.

Mais un responsable américain a ensuite reconnu que Sergueï Lavrov n'avait fourni «aucune indication» d'un «changement dans les prochains jours» à la frontière russo-ukrainienne, où les Occidentaux accusent Moscou d'avoir massé plus de 100'000 soldats en vue d'une possible invasion du pays voisin.

«Nous continuons d'entendre les assurances selon lesquelles la Russie n'a pas l'intention d'envahir, mais toutes les actions que nous voyons disent clairement l'inverse», a regretté ce responsable.

La Russie dément

La Russie dément toute intention belliqueuse, mais conditionne toute désescalade à des garanties pour sa sécurité, notamment l'assurance que l'Ukraine ne sera jamais membre de l'Otan et que l'Alliance retirera ses forces sur ses positions de 1997, soit celles d'avant ses élargissements successifs en Europe orientale.

Washington a rejeté ces demandes dans un courrier la semaine dernière, tout ouvrant la porte à des négociations sur d'autres sujets, comme le déploiement de missiles ou des limites réciproques aux exercices militaires.

L'échange Lavrov-Blinken était le premier depuis cette lettre américaine. Et les deux hommes n'ont pas acté de rupture, malgré des positions toujours opposées.

Tout en réitérant la menace de sanctions «rapides et sévères» en cas d'offensive russe, le chef de la diplomatie américaine a dit vouloir «poursuivre un échange substantiel avec la Russie sur les inquiétudes de sécurité mutuelles».

«Antony Blinken était d'accord qu'il y a des raisons pour poursuivre le dialogue» sur ce thème de la sécurité de la Russie, a aussi semblé se réjouir Sergueï Lavrov. «On verra comment ça se passe», a-t-il glissé à la télévision russe.

Boris Johnson à Kiev

Signe de soutien alors que des dizaines de milliers de soldats russes sont massés à la frontière de l'Ukraine, le premier ministre britannique Boris Johnson devait se rendre mardi à Kiev, où son homologue polonais Mateusz Morawiecki l'a précédé.

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky s'est réjoui de l'appui diplomatique et militaire occidental croissant face à Moscou, «le plus important» selon lui depuis 2014, quand la Russie a annexé la péninsule ukrainienne de Crimée.

Frapper au portefeuille

Pour dissuader Moscou de toute agression, les Occidentaux ont aussi accéléré leurs préparatifs de sanctions économiques. Les Etats-Unis comme le Royaume-Uni, qui est l'un des terrains d'investissement favoris des grandes fortunes russes, ont ainsi dit lundi vouloir frapper au portefeuille des proches du Kremlin. Les oligarques russes risqueront le gel de leurs avoirs au Royaume-Uni et l'impossibilité d'entrer sur son territoire.

«Nous n'allons pas battre en retraite et nous tenir au garde-à-vous en écoutant les menaces de sanctions américaines», a répliqué mardi l'ambassade russe à Washington.

Si Moscou privilégie depuis le début de cette crise des contacts directs avec Washington, les Européens s'efforcent de rester dans le jeu diplomatique.

Lors d'un entretien téléphonique mardi, le chef du gouvernement italien Mario Draghi a appelé Vladimir Poutine à une «désescalade». Lundi, à la veille de son déplacement à Kiev, Boris Johnson a exhorté la Russie à «reculer et à engager un dialogue».

Comme en réponse à ce front occidental, le président russe a lui reçu mardi le Hongrois Viktor Orban, dont le déplacement est critiqué par l'opposition au vu des tensions autour de l'Ukraine.

Chose rare, le maître du Kremlin, qui ne s'est pas exprimé sur le fond du dossier ukrainien depuis fin décembre, devait donner une conférence de presse avec son hôte en fin d'après-midi.

(ATS)

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