Crise en Ukraine
Froideur russe après la réaction américaine à ses exigences

La Russie a froidement accueilli jeudi le rejet par Washington de ses exigences sécuritaires, un échange qui alimente la crise russo-occidentale sur l'Ukraine, même si les deux camps laissent encore la porte ouverte au dialogue.
Publié: 27.01.2022 à 13:43 heures
Un soldat ulrainien près de la ligne de front avec les séparatistes pro-russes, près du village de Peski, dans la région de Donetsk, le 25 janvier 2022.
Photo: ANATOLII STEPANOV

Les Etats-Unis et l'Otan ont sans surprise formellement rejeté mercredi des demandes clés de Moscou, à savoir la fin de la politique d'élargissement de l'Otan et un retour de ses déploiements militaires sur les frontières de 1997.

La Russie considère ces points comme des menaces existentielles nourrissant le risque de conflit en Ukraine. Elle veut donc redessiner l'architecture sécuritaire européenne issue de la fin de la Guerre froide et de l'URSS. «On ne peut pas dire que nos points de vue aient été pris en compte, ou qu'il y ait une volonté de prendre en considération nos préoccupations», a regretté jeudi le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov. «Nous n'allons pas faire trainer notre réaction (...), mais ne nous attendons pas à ce que cette réaction arrive là, maintenant», a-t-il ajouté.

Porte diplomatique ouverte?

Le chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov a lui constaté l'absence de «réponse positive à la question principale» soulevée par la Russie. Mais il a laissé la porte ouverte à la reprise du dialogue en relevant qu'«il y a une réaction (américaine) qui permet d'espérer le début d'une conversation sérieuse sur des questions secondaires».

Le chef de la diplomatie américaine Antony Blinken a indiqué avoir proposé une «voie diplomatique sérieuse» à Moscou en vue d'une désescalade. Par le passé, les Occidentaux avaient évoqué des dossiers comme le contrôle des armements et des mesures de transparence militaire comme sujets d'intérêts communs. Washington a exhorté Moscou en outre de ne pas envahir son voisin ukrainien, une offensive qui se traduiraient par des «risques mondiaux».

Des dizaines de milliers de militaires russes campent à la frontière ukrainienne avec leurs blindés depuis fin 2021, et la numéro 2 de la diplomatie américaine Wendy Sherman a jugé que Vladimir Poutine pourrait passer à l'action «peut-être entre maintenant et mi-février». La Russie dément tout projet d'invasion, mais s'estime menacée par l'expansion de l'Otan depuis 20 ans ainsi que par le soutien politique et militaire occidental à son voisin ukrainien.

Soutien chinois à Moscou

Elle a prévenu que le rejet de ses exigences allait se traduire par des représailles, balayant au passage les menaces de sanctions sans précédent que les Occidentaux disent vouloir imposer en cas d'offensive en Ukraine. Moscou peut se satisfaire jeudi du soutien explicite de la Chine, le ministre chinois des Affaires étrangères, Wang Yi, ayant défendu jeudi les «préoccupations raisonnables» de la Russie pour sa sécurité, lors d'un échange téléphonique avec son homologue américain Antony Blinken.

Si l'Ukraine ambitionne de rejoindre l'Otan, les Occidentaux leur signifient depuis des années qu'un tel élargissement n'est pas dans les cartes. Le Kremlin réclame en revanche des «garanties juridiques» sur la fin de l'expansion de l'Alliance, ce que les Occidentaux refusent de faire au nom du droit des Etats à choisir leurs alliés. Un principe que Sergueï Lavrov a opposé jeudi à «la nécessité de prendre en compte les intérêts de sécurité de tout autre État», dont la Russie.

L'Ukraine reçoit bel et bien une assistance occidentale, même si les autorités ukrainiennes la juge limitée, alors que l'armée de Kiev fait face à des séparatistes pro-russes depuis 2014 dans l'est du pays. Malgré ses dénégations répétées, Moscou apparaît comme l'instigateur de ce conflit déclenché après l'annexion de la Crimée ukrainienne.

Des armes aux séparatistes?

Dans ce dossier, une lueur d'espoir est apparue mercredi soir après des semaines de rhétorique guerrière: une réunion à Paris a rassemblé négociateurs russes, ukrainiens et médiateurs franco-allemands. Ces derniers ont repris rendez-vous pour février, promettant de travailler à garantir une trêve dans l'Est.

La France a salué «un bon signal» de «réengagement» de la part des Russes malgré les «conditions difficiles», avant un entretien vendredi entre le président Emmanuel Macron et Vladimir Poutine. Parallèlement, cependant, le parti du Kremlin, Russie Unie, a appelé mercredi les autorités russes à armer les séparatistes en Ukraine. Jeudi, le principal représentant de ces sécessionnistes a réclamé des armes modernes, en particulier pour faire face aux drones ukrainiens, acquis auprès de la Turquie et réputés d'une efficacité redoutable. Renforçant le sentiment d'une possible escalade militaire, Washington a «exhorté» mercredi ses ressortissants à «envisager de partir maintenant» d'Ukraine.

Les autorités ukrainiennes jugent la menace plus mesurée, le ministre des Affaires étrangères, Dmytro Kouleba ayant estimé que les 100.000 soldats russes à la frontière ne suffiraient pas à «une offensive à grande échelle contre l'Ukraine».

(AFP)

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