Accord entre Kiev et Moscou
Le premier chargement de céréales par l'Ukraine en attente d'inspection

Des responsables russes et ukrainiens doivent inspecter mercredi près d'Istanbul le premier chargement de céréales exporté par l'Ukraine depuis le début de l'invasion russe. Ce en application de l'accord signé entre Kiev et Moscou afin d'enrayer la crise alimentaire.
Publié: 03.08.2022 à 07:05 heures
Le Razoni, un cargo battant pavillon de la Sierra Leone, s'était présenté mardi en vue des rives nord d'Istanbul après avoir quitté le port ukrainien d'Odessa lundi avec 26'000 tonnes de maïs à destination de Tripoli au Liban.
Photo: Michael Shtekel

Le Razoni, un cargo battant pavillon de la Sierra Leone, s'était présenté mardi en vue des rives nord d'Istanbul, sur la mer Noire, après avoir quitté le port ukrainien d'Odessa lundi avec 26'000 tonnes de maïs à destination de Tripoli au Liban.

Le navire sera inspecté mercredi matin par une équipe conjointe de responsables russes et ukrainiens à l'entrée du Bosphore, conformément au souhait de la Russie qui veut s'assurer de la nature de la cargaison, a précisé le ministère turc de la Défense. Des céréales sont déjà parties d'Ukraine depuis le déclenchement de l'offensive russe, mais de Berdiansk (sud-est), sur la mer d'Azov, une zone occupée par les Russes.

«Notre but désormais est la régularité. (...) La continuité, la régularité est un principe nécessaire pour les consommateurs de notre production agricole», a déclaré le président ukrainien Volodymyr Zelensky dans son allocution quotidienne mardi soir, fustigeant l'«Etat terroriste» russe qui «a provoqué la crise alimentaire afin d'utiliser les céréales, le maïs et le pétrole comme des armes».

Lundi, le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres avait «chaleureusement» salué le départ du Razoni, exprimant l'espoir que la reprise des exportations ukrainiennes, permise par un accord international, «apportera la stabilité et l'aide indispensables à la sécurité alimentaire mondiale».

Couloirs sécurisés pour les céréales

Au cours d'un entretien avec son homologue ukrainien, le président français Emmanuel Macron l'a assuré lundi de la poursuite des «efforts européens» pour aider l'Ukraine à exporter ses céréales. Selon le chef de la diplomatie ukrainienne Dmytro Kouleba, 16 autres bateaux chargés de céréales «attendent leur tour» pour quitter Odessa, le principal port ukrainien, situé sur la mer Noire, qui concentrait avant la guerre 60% de l'activité portuaire du pays.

L'accord signé le 22 juillet par la Russie et l'Ukraine, via une médiation de la Turquie et sous l'égide des Nations unies, permet la reprise des envois vers les marchés mondiaux de céréales ukrainiennes bloquées depuis l'invasion russe, sous supervision internationale.

Le document prévoit notamment l'instauration de couloirs sécurisés afin de permettre la circulation en mer Noire des navires marchands et l'exportation de 20 à 25 millions de tonnes de céréales. «Espérons que les accords seront appliqués par toutes les parties et que les mécanismes fonctionneront efficacement», a pour sa part dit le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov.

Un accord similaire signé simultanément garantit à la Russie l'exportation de ses produits agricoles et de ses engrais, malgré les sanctions occidentales. Les deux accords doivent permettre d'atténuer la crise alimentaire mondiale provoquée par la montée en flèche des prix des denrées alimentaires dans certains des pays les plus pauvres.

Une situation tendue dans le Sud

Sur le plan militaire, l'armée de l'air ukrainienne a affirmé mardi que les forces russes avaient tiré huit missiles de croisière à partir de la mer Caspienne sur le territoire de l'Ukraine, dont l'un «a atteint un complexe de défense antiaérienne dans la région de Lviv», dans l'ouest. Les sept autres missiles ont été interceptés, selon cette source.

«Il n'y a pas d'informations sur d'éventuelles victimes pour le moment», a écrit sur Twitter le gouverneur de la région, Maksym Kozytsky. A Mykolaïv, une ville proche du front dans le sud de l'Ukraine, «des explosions puissantes» ont été entendues mercredi vers 5h du matin, a indiqué le maire Oleksandre Senkevytch sur Telegram.

Dans la région voisine de Kherson, la première ville d'importance tombée aux mains de l'armée russe, le 3 mars, «la situation reste tendue», a-t-elle relevé. Mais l'Ukraine, qui mène actuellement une contre-offensive dans le sud, a annoncé mardi y avoir repris 53 localités.

Dans la même région, le chef de l'administration militaire de Kryviy Rih, Oleksander Vilkul, a signalé la mort de deux civils qui se trouvaient dans un minibus tentant de quitter le village de Starosillya, aux mains des Russes. Cinq autres personnes ont été évacuées, dont deux, grièvement blessées, ont été hospitalisées.

Soutien des Etats-Unis

L'artillerie est décisive dans le conflit en Ukraine. Particulièrement gourmandes en projectiles de toutes sortes, les armées ukrainienne et russe se livrent à une guerre d'usure au niveau des munitions.

Les Etats-Unis, le principal soutien de l'Ukraine, ont annoncé lundi l'envoi de nouvelles armes à Kiev pour 550 millions de dollars, portant ainsi leur assistance militaire à plus de huit milliards. Cette aide comprendra des munitions pour les lance-roquettes Himars et 75'000 obus de 155 mm. Volodymyr Zelensky a remercié le président américain mardi soir, expliquant que «le mot 'Himars' est presque devenu un synonyme du mot 'justice' pour notre pays».

«Oui, c'est vrai, nous ne pouvons pas battre complètement l'armée russe en termes d'artillerie et d'effectifs. Et nous le sentons dans les combats, en particulier dans le Donbass (est), à Pisky, Avdiivka et ailleurs. C'est l'enfer là-bas. Il n'y a pas de mots pour décrire ce qui s'y passe», a-t-il ajouté.

De son côté, la Cour suprême russe a classé mardi le régiment ukrainien Azov, célèbre pour avoir défendu Marioupol, dans le sud-est de Ukraine, comme «organisation terroriste», ce qui pourrait valoir de très lourdes poursuites à ses combattants faits prisonniers.

«Toute décision des tribunaux russes concernant la guerre en Ukraine (...) n'est pas légitime du point de vue du droit international» et «la Russie portera la responsabilité juridique directe des mauvais traitements infligés aux prisonniers de guerre», a par la suite réagi un conseiller du président ukrainien, Mykhailo Podoliak.

(ATS)

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