A neuf mois de la présidentielle
La Cour suprême débat de l'inéligibilité de Trump

La Cour suprême des États-Unis évaluera ce jeudi si Donald Trump peut être disqualifié de la présidentielle à cause de son rôle lors de l'assaut du Capitole.
Publié: 08.02.2024 à 08:03 heures
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Dernière mise à jour: 08.02.2024 à 10:08 heures
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La Cour suprême des Etats-Unis, à Washington, le 5 février 2024
Photo: MANDEL NGAN

Les actes de Donald Trump lors de l'assaut du Capitole le rendent-ils inéligible? Les neuf juges de la Cour suprême américaine tentent jeudi de désamorcer cette question explosive, à moins de neuf mois du scrutin présidentiel. L'ex-président, archifavori des primaires républicaines, demande l'annulation de la décision en décembre de la justice du Colorado ordonnant son retrait des bulletins de vote dans cet Etat de l'ouest du pays.

Les commentateurs juridiques se disputent sur la validité comme sur l'opportunité politique d'une telle procédure. Mais tous s'accordent à penser que la cour à majorité conservatrice, échaudée par les retombées de sa décision de 2000 donnant la victoire au républicain George W. Bush sur le démocrate Al Gore, voudra éviter de prêter le flanc aux soupçons d'ingérence électorale.

Sur la vingtaine d'Etats dans lesquels des recours en inéligibilité ont été engagés contre Donald Trump, seuls deux ont abouti, dans le Colorado et le Maine (nord-est). Plusieurs Etats attendent néanmoins que la Cour suprême se prononce pour statuer définitivement. Les avocats de Donald Trump qualifient la décision du Colorado d'«anomalie» et appellent la Cour suprême à la casser pour «protéger les droits de dizaines de millions d'Américains qui souhaitent voter pour le président Trump».

Exclut des plus hautes fonctions publiques

Ils consacrent l'essentiel de leurs ultimes arguments écrits à une question apparemment secondaire. Ils s'efforcent de démontrer que la présidence des Etats-Unis ne fait pas partie des fonctions concernées par le 14e amendement de la Constitution.

Cet amendement, adopté en 1868, visait alors les partisans de la Confédération sudiste vaincue lors de la guerre de Sécession (1861-1865). Il exclut des plus hautes fonctions publiques quiconque se serait livré à des actes de «rébellion» après avoir prêté serment de défendre la Constitution. La justice du Colorado a considéré que les actes de Donald Trump le 6 janvier 2021 relevaient bien du 14e amendement.

Ce jour-là, des centaines de partisans du président sortant chauffés à blanc, notamment par ses allégations de fraudes électorales, avaient pris d'assaut le Capitole, sanctuaire de la démocratie américaine, pour tenter d'y empêcher la certification de la victoire de son adversaire démocrate Joe Biden. Les avocats de Donald Trump soutiennent, eux, que le 6 janvier 2021 ne constituait pas une rébellion et que leur client n'y était nullement impliqué.

«Echappatoire»

Le caractère largement inédit du dossier complique tout pronostic, mais beaucoup d'experts prêtent aux neuf juges la tentation de trouver une «échappatoire» pour maintenir le nom de Donald Trump sur les bulletins de vote sans s'aventurer sur le terrain miné de la qualification de ses actes pendant l'assaut du Capitole.

«Dans une affaire aussi politiquement brûlante, la Cour veut apparaître le plus apolitique possible», explique à l'AFP Steven Schwinn, professeur de droit constitutionnel à l'Université de l'Illinois à Chicago, estimant qu'elle «porte encore les stigmates de l'élection de 2000». Selon lui, «l'échappatoire la plus probable pour elle serait d'affirmer que seul le Congrès est habilité à retirer un candidat du bulletin pour l'élection présidentielle».

Un argument d'ailleurs invoqué par les avocats de Donald Trump, mais contesté par des juristes qui soulignent qu'aucune intervention du Congrès n'est requise pour appliquer d'autres conditions d'éligibilité, comme l'âge minimal des candidats ou leur lieu de naissance.

«Nous comprenons parfaitement que les membres de la Cour préféreraient ne pas se retrouver embringués ainsi dans une élection présidentielle. Mais il n'y a pas moyen d'y échapper», écrivent dans un mémoire trois juristes renommés d'horizons politiques différents. Edward Foley, Benjamin Ginsberg et Richard Hasen exhortent les neuf juges à statuer sur le fond et non pas sur des questions de forme, afin de trancher définitivement le nœud gordien avant le jour du vote, le 5 novembre.

Sous peine, «avec un pays plus polarisé que jamais dans l'histoire récente», préviennent-ils, de «prendre le risque d'une instabilité politique jamais vue depuis la guerre de Sécession».

(AFP)

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