Les explications d'un immunologue
Pour finir, le froid rend-il malade ou non?

Vous pensez que le froid rend malade? Ou vous croyez que les températures basses ne sont pas responsables des pics d'infections en hiver? Dans les deux cas, vous avez partiellement raison. Explications avec François Spertini, immunologue lausannois.
Publié: 17.01.2023 à 14:03 heures
Sortez vos mouchoirs!
Photo: Shutterstock
Blick_Jessica_Chautems.png
Jessica ChautemsJournaliste Blick

Avec l’hiver et les chutes du mercure arrivent les reniflements et les boîtes de Kleenex vides. Tout le monde semble y passer. «Ne m’approchez pas trop, j’ai à nouveau chopé froid», soupire un énième proche ou collègue. Mais le froid rend-il vraiment malade?

Longtemps, on nous a répété que c'était un mythe. Que la cause de la maladie était toujours un virus — qui se propage par la transmission de fines gouttelettes (toux, éternuements…) et apprécie les températures fraîches, comme les rhinovirus ou la grippe. Et que si nous attrapons davantage le rhume en hiver, c'est que nous nous retrouvons plus fréquemment à l’intérieur et à proximité d’autres individus. En tête de la liste des suspects: les fêtes de fin d’année. Une hypothèse confirmée par François Spertini, médecin lausannois spécialisé en allergologie et en immunologie. «Nous enregistrons un nombre très élevé de personnes infectées ce début janvier», note-t-il également.

Ça ne veut pas pour autant dire que l'arrivée des frimas n'a aucun impact sur notre système immunitaire. Il pourrait l'affaiblir, mais aussi le renforcer... «C’est compliqué, souligne le praticien, affilié à la Clinique de la Source et au Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV). Premièrement, nous pensons que le froid, un stress pour l'organisme, pourrait favoriser transitoirement une immunosuppression.»

Un phénomène encore peu connu. Dans une étude publiée début décembre 2022 dans le très sérieux «Journal of Allergy and Clinical Immunology», des chercheurs étasuniens sont parvenus à identifier des cellules dans les muqueuses du nez dont l’action immunitaire serait moindre lorsque le thermomètre descend. Des conclusions prometteuses, mais qui n’expliquent que partiellement le fonctionnement de la défense immunitaire en hiver. Beaucoup d'inconnues subsistent.

«Il ne faut pas avoir peur du froid»

Des questions aussi. Si la contamination est toujours le fruit d'un agent pathogène, pourquoi tombe-t-on parfois malade le jour après avoir été au froid? «Il est possible qu’une transition rapide de température pour quelqu’un qui est déjà fragile et stressé favorise à ce qu’il se réveille souffrant le lendemain, concède François Spertini. Mais la charge virale était probablement déjà présente auparavant.» En clair et de manière générale, la contamination a lieu quelques jours avant les premiers éternuements.

Comment savoir si j'ai un rhume ou une grippe?

SymptômesGrippeRhume
Fièvre- Fréquente et début soudain- Absente ou légère
Toux- Fréquente et début soudain- Fréquente et légère
Maux de tête- Fréquents et parfois intenses- Rares
Douleurs et courbatures- Fréquentes et parfois intenses- Légères
Fatigue- Fréquente et intense- Fréquente et légère
Nausée- Rare chez les adultes- Rare
Ecoulement nasal- Rare, plus fréquent chez les enfants- Fréquente
Eternuements- Rares- Fréquents
Mal de gorge- Fréquent- Fréquent

Les symptômes et leur gravité peuvent varier selon l’âge et l’état de santé de la personne.

Reste que l'hiver et sa bise glaciale ne sont pas forcément néfastes pour le corps. Une exposition régulière et modérée, lorsque l’on est en bonne santé, renforcerait même le système immunitaire, observe le médecin lausannois. Attention toutefois: selon lui, aucune étude convaincante n'existe à ce sujet.

Alors, en résumé, faut-il éviter tout contact et rester calfeutré chez soi ou s'immerger dans des eaux glaciales tous les jours? «Il ne faut pas avoir peur du froid», soutient le praticien. Il conseille de sortir régulièrement pour respirer l’air frais, bien habillé et en faisant des efforts modérés. De l’exercice physique à un niveau d’intensité élevé peut représenter un stress négatif pour le système immunitaire.

«Prendre son mal en patience»

Encore une question, docteur! Comment se soigner quand la crève s'installe? «Prendre son mal en patience, martèle-t-il. Les symptômes ne vont pas disparaître au bout d’une journée.» Il faut s’attendre à être dans un état piteux pendant 5 à 7 jours. Si vous êtes en bonne santé, l'immunologue déconseille de courir chez le médecin ou aux urgences. D’une part, parce qu’aucun médicament ne pourra vous être prescrit – les antibiotiques n’ont pas d’utilité, et, d’autre part, pour éviter de surcharger le système de santé.

Privilégiez une hydratation à coup de boissons chaudes, le repos et les anti-inflammatoires. Guérir peut prendre jusqu’à deux semaines. «Le virus fait des dégâts au niveau du nez et des poumons, souligne le Vaudois. Ils doivent donc cicatriser, une fois l’infection combattue. La toux persiste jusqu’à ce que les cellules mortes soient éliminées.»

Il est conseillé d’aller consulter un médecin en cas d'atteinte sévère des fonctions respiratoires, d'expectorations colorées, de maux de tête persistants et invalidants et/ou de fièvre élevée. Quoi qu'il en soit, sortez couverts!

Vous avez trouvé une erreur? Signalez-la