Festival de soupes à Fribourg
«Début novembre, on est sold-out presque aussi vite que le Paléo!»

Vous aimez le vin chaud et les potages? Oubliez le marché de Noël, à Fribourg c’est au festival de soupes que ça se passe! Au centre-ville, le kiosque à musique de la place Python se transforme en restau-concert le temps de l’Avent.
Publié: 15.12.2022 à 15:00 heures
Florent, Simon et Kamel, membres de l’équipe d’organisation du festival.
Photo: Nadine Schouwey
Nadine Schouwey

Comme chaque année depuis 17 ans, ça mijote fort dans les chaudrons à «la PJ», place Georges-Python en dialecte fribourgeois. Ce sont chaque soir près d’une centaine de litres de soupe qui sont servis aux plus démunis, mais aussi aux familles et aux locaux, dans une ambiance très festive et inclusive.

Attirée par l’odeur de la minestrone et par les joyeux chants de l’orchestre, je me suis rendue au festival de soupes, organisé par la Tuile, centre d’accueil d’urgence pour les personnes en situation de précarité. Par moins 8 degrés et après quelques triples lutz à l’arrêt de bus, c’est avec un grand plaisir que j’ai poussé la porte du kiosque, bâché et chauffé pour l’occasion.

Première réflexion: c’est dingue tout ce qui tient dans un si petit espace! Dans cet octogone d’à peine 60 mètres carrés, on trouve un bar, une scène, une dizaine de tables avec 60 places assises, un petit salon et même une cabane pour que les enfants puissent jouer sous l’œil des parents, à l’abri des soupes brûlantes. L’endroit est plein, huit bénévoles servent des bols fumants, le groupe «Paula et ses drôles d’oiseaux» ambiancent le public, mais personne ne se marche sur les pieds.

Photo: Nadine Schouwey

Le festival des soupes, c’est le projet un peu fou d’Eric Mullener, directeur de la Tuile, et de son équipe. En décembre, chaque soir, du vendredi suivant la Saint-Nicolas et jusqu’au 25 décembre, des bénévoles servent une soupe gratuite dans le kiosque de la place Python, aménagé en véritable restaurant. Les organisateurs comptent avec une capacité d’environ 200 couverts, toutefois sans jamais avoir dû refouler personne: une soupe, ça se rallonge au besoin! De plus, les commerces locaux, dont des boulangeries, offrent leurs invendus, et une jolie carte de boissons est proposée. Seul (l’excellent) vin chaud est payant. Pour le reste, c’est à votre bon cœur.

La musique compte autant que le menu

Dix-neuf heures, le concert commence, comme tous les soirs du festival. Selon Eric Mullener, la programmation musicale compte autant que le menu: «On ne propose pas qu’une soupe, on offre du plaisir et des rencontres, par la culture et par la mixité sociale. Pour cela, c’était important pour nous que l’événement puisse avoir lieu au centre-ville.»

«
Tout est cuisiné sur place par des bénévoles qui viennent avec leurs recettes, parfois même avec les ingrédients
»

Parmi les clients, une petite moitié de personnes en situation de précarité, mais aussi beaucoup de familles et de groupes d’amis, dont des habitués, qui reviennent chaque année. «On évite d’en faire une soupe populaire, qui répondrait à l’objectif alimentaire, mais pas social. Le festival est ouvert à toutes et tous, sans misérabilisme», explique Eric Mullener. La nouveauté en 2022, c’est une petite annexe, ouverte dès 16 heures, dans laquelle différentes organisations du réseau social fribourgeois se relaient et proposent des permanences.

Tout est cuisiné sur place, par des équipes de bénévoles, qui viennent avec leurs recettes, parfois même avec les ingrédients. Au total, ce sont quelque 1800 litres de soupe qui seront servis sur l’ensemble de la manifestation. En comptant les artistes, ce ne sont pas moins de 450 personnes qui œuvrent pour le festival. Les bénévoles ne sont pas difficiles à trouver. Eric Mullener plaisante: «Notre plus gros problème est un problème de luxe: on a plus de demande que d’offre pour le bénévolat. Quand on ouvre les inscriptions, début novembre, on est sold-out presque aussi vite que le Paléo.»

Il n’y a pas de prérequis pour cuisiner une soupe, et les équipes sont encadrées par un cuisinier professionnel. Pas de profil type non plus: «Le point commun, c’est la générosité. Ça arrive qu’on ait des groupes de professionnels, on a déjà eu des chefs étoilés. Mais il y a aussi des familles entières, des associations ou des politiciens et politiciennes; même un conseiller fédéral est passé par nos fourneaux! Des personnalités de tous bords, qui viennent pour cuisiner en toute humilité».

Conseiller d’État et bénévole

Habitué de la manifestation, le conseiller d’État Jean-François Steiert vient chaque année avec sa brigade, constituée d’amis et de collègues. Pour ce passionné de cuisine, la recette est choisie avec soin. «Comme je participe depuis quinze ans, je note mes recettes, pour ne pas faire deux fois de suite la même chose. La soupe de cette année est d’actualité politique, puisque ce sera un Bortsch, garni d’une tombée de crème acidulée et d’aneth frais. J’aime bien l’idée de faire découvrir une culture culinaire aux gens, et on a peu l’occasion de manger des plats de l’Est européen chez nous». Mais alors, conseiller d’État et bénévole, c’est vraiment compatible ? «Oui, comme tout le monde, je dois gérer mon budget-temps, mais ça fait du bien d’oublier le monde de la politique un instant pour faire autre chose!», répond Jean-François Steiert.

«Je suis bénévole pour d’autres associations, ça surprend parfois les gens quand ils me voient vendre des billets à la caisse d’un festival de musique. Mais si on veut rester bon dans notre travail, il faut régulièrement remettre en question et ce que l’on fait et pour cela, il faut aller à la rencontre de la population. Le festival de soupes me permet d’entendre d’autres voix, il crée des rencontres qui n’existeraient pas autrement». Une accessibilité que les Fribourgeois lui connaissent bien, puisqu’ils sont nombreux à venir papoter, déjà dans l’après-midi, lorsqu’il est aux fourneaux. Il rigole: «des fois, je dois me rappeler que je suis là aussi pour couper des légumes, et pas seulement pour discuter!»


Horaires
du 9 au 23 décembre, de 16h à 22h
Les 24 et 25 décembre, de 16h à minuit (la soupe est servie dès 18h00)

Vous avez trouvé une erreur? Signalez-la