Connaissez-vous les merveilleux? Ces fameuses gourmandises, ma copine Anna — plutôt du genre bonne vivante et toujours à l’affût des bons plans — m’en avait déjà parlé.
Habitant à Lyon un temps, elle avait déjà goûté ces petites pâtisseries soi-disant au goût de reviens-y. Un peu mystérieuse, mais visiblement émerveillée par ces «merveilleux merveilleux», elle avait évoqué la meringue, le croquant, la légèreté, le chocolat. Bref, j’étais curieuse et sceptique à la fois. Le sucre de la meringue, celui de la chantilly… Avec du chocolat par-dessus le marché… Moi qui suis plutôt biscuits sablés que gâteaux à la crème, je demandais à voir. Ou plutôt à goûter.
J’avoue tout de même que je gardais dans un coin de ma tête la leçon apprise il y a une bonne vingtaine d’années à mon arrivée en Suisse, lorsqu’on m’avait parlé de meringues à la double crème. J'avais bien vite ravalé ma mine de dégoût devant la perspective de l’écœurement pour la remplacer par un sourire béat après dégustation. Oui, l’accord meringue et crème bien épaisse peut être diablement bon. Non, les Helvètes n’étaient, avec ce dessert du diable, pas simplement tombés sur la tête.
Au début de l’été dernier, c’est donc toute guillerette qu'Anna m’annonçait la bonne nouvelle: au boulevard de Grancy, en lieu et place d’une ancienne agence de voyage, une arcade en travaux affichait l’ouverture prochaine d’une enseigne «Aux Merveilleux de Fred». Après les deux boutiques déjà installées à Genève, à Rive et Plainpalais, et après celles ouvertes en Allemagne, au Japon, au Canada ou encore aux États-Unis, la divine gourmandise allait tenter de séduire les papilles vaudoises, plus habituées à l’incontournable carac vert, qu’à ces meringues crémeuses immaculées.
Une pâtisserie venue du nord
Créée à Lille en 1997 par Frédéric Vaucamps, un pâtissier du nord de la France, la première enseigne a depuis fait des petits, devenant une véritable success story. Toutes décorées de façon élégante comme une ancienne échoppe à la française, les arcades proposent partout les mêmes produits et le même concept.
Dans les boutiques, merveilleux, brioches et viennoiseries sont, chaque jour et tout au long de la journée, fabriquées artisanalement et à partir d'ingrédients locaux, sur place, et sous les yeux des passants et des clients. Héritiers d’une pâtisserie créée sous le Directoire, les merveilleux ont, depuis, subi quelques améliorations voulues par Fred, la crème au beurre d’origine étant remplacée par de la crème fouettée pour plus de légèreté.
Bien décidée à expérimenter cette nouveauté, c’est à l’occasion d’une invitation à dîner que je passe la porte de la jolie boutique pour ramener des merveilleux à mes hôtes.
Innocente et ignorante comme l’agneau qui vient de naître, je me renseigne. Qu’est-ce qui se cache derrière ce nom prometteur de merveilleux? Enthousiaste, la vendeuse me confirme qu’il s’agit d’une pâtisserie à base de meringue, surmontée de crème fouettée aromatisée selon le choix du gâteau, et roulée dans des copeaux de chocolats, des noisettes concassées ou encore des miettes de meringues cristallisées.
Oui parce qu'il y a du choix, voyez-vous. Le merveilleux est la version au chocolat. L’incroyable, lui, décline le spéculoos et le chocolat blanc, l’impensable le café, le magnifique le praliné et le sans-culotte le caramel. Tandis que l'éphémère change de saveurs au gré des saisons. À la crème de marrons à l’automne, il affiche un goût et une couleur de cerise aux beaux jours.
Devant les différents formats disponibles, individuels, plus importants, façon gâteau à partager, et mini, j’opte pour un assortiment façon dégustation d’une vingtaine d’exemplaires riquiquis à même de sustenter les huit convives attendus le soir. J’en profite pour embarquer aussi l’une de leurs «cramiques», une brioche à peine sortie du four, au sucre, aux pépites de chocolat, aux raisins secs ou nature, qui sera parfaite pour le petit déjeuner du lendemain.
«Live cooking»
Le soir, au moment du dessert, l’ouverture de la boîte de merveilleux fait son effet. Autour de la table, personne n’a jamais goûté. Curieuse et ravie de mon petit effet, mon choix se porte sur un impensable au café. Le croquant de la meringue, la légèreté de la crème fouettée aérienne et la légère saveur du café me plaisent. Je poursuis par un incroyable au spéculoos et au chocolat blanc qui, pour le coup, est un peu trop sucré pour moi. Autour, les invités sont séduits et enchaînent la dégustation jusqu’à vider la boîte, à raison de 2 à 3 exemplaires par personne. Verdict, le petit délice est aérien, frais et se laisse déguster. Même les moins becs à miel de la bande sont séduits par la légèreté de ces petites bouchées.
De retour à la boutique quelques jours plus tard, les cogérants Elena et son compagnon Simone, occupés à façonner des merveilleux sous les yeux des passants du boulevard de Grancy, me donnent plus de détails sur la boutique. C’est Elena, pâtissière venue d’Italie pour œuvrer à la boutique de Genève, qui a eu l’idée de cette adresse vaudoise, embarquant avec elle Simone, son cuisinier de compagnon.
À Lausanne, ils sont, avec un autre boulanger, trois à préparer merveilleux, cramiques et viennoiseries tout au long de la journée: «C’est l’une de nos particularités. Nos gâteaux sont du jour et fabriqués toute la journée. Ce qui fait qu’un client qui passe à six heures du soir aura une brioche encore chaude», explique Simone. Quant au fait de travailler en live cooking derrière la vitrine, le duo en a pris l’habitude comme le confirme Elena: «Cela permet de monter ce beau travail artisanal et que tout ce qui est vendu ici est fait sur place.» On ressort de la boutique convaincue, ces petits merveilleux vont en rendre plus d’un accro.