Le gouvernement français a indiqué lundi avoir préparé un nouveau décret visant à interdire l'utilisation de noms comme «steak» ou «grillade» pour désigner des produits à base de protéines végétales, déterminé à imposer cette différenciation. Le texte est une revendication de longue date des acteurs de la filière animale, qui estiment que des termes comme «jambon végétal», «saucisse véganes» ou «bacon végétarien» peuvent créer la confusion chez les consommateurs.
Le gouvernement avait publié un premier décret en juin 2022, mais ce dernier a été suspendu en référé par le Conseil d'Etat. La plus haute juridiction administrative, qui n'a pas encore tranché sur le fond du dossier, a saisi en juillet 2023 la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) sur des questions d'interprétation de la réglementation européenne en matière d'étiquetage. Le ministère de l'Agriculture affirme avoir pris en compte les remarques du Conseil d'Etat pour préparer un nouveau texte, sans attendre l'aboutissement de la procédure auprès de la CJUE. Il a notamment ajouté deux listes précisant les termes à réserver aux produits animaux ou ne contenant que très peu de protéines végétales, comme faux-filet, escalope, andouille ou chorizo.
Un «enjeu de transparence» selon le ministre
Le texte «est un enjeu de transparence et de loyauté qui répond à une attente légitime des consommateurs et des producteurs», a estimé le ministre de l'Agriculture français Marc Fesneau, cité dans un communiqué. Le nouveau texte demeure problématique aux yeux de Guillaume Hannotin, avocat de l'organisation Protéines France qui défend les industriels de la filière des protéines végétales et avait demandé la suspension du premier décret. Il reste, selon lui, en contradiction avec la réglementation européenne sur l'étiquetage, qui, à défaut d'une définition légale comme pour le lait, accepte des dénominations d'usage ou descriptives pour les alternatives à la viande.
«Le terme 'steak végétal' est utilisé depuis plus de 40 ans», remarque-t-il auprès de l'AFP. Et certains mots évoquant une forme, comme la saucisse, ou une façon de cuisiner «sont difficiles à remplacer». La démarche du gouvernement s'apparente par ailleurs, estime Guillaume Hannotin, à du mépris envers les procédures européennes puisqu'elle «torpille la procédure préjudicielle en cours devant la CJUE».
La cofondatrice de l'association de défense des animaux L214, Brigitte Gothière, a dénoncé pour sa part une «manipulation exemplaire du ministère de la viande». «Est-ce que les gens confondent l'huile de moteur, l'huile d'olive et l'huile de jojoba? J'crois pas. Pas plus qu'ils confondent les steaks végétaux et ceux de bœuf», écrit-elle sur X (ex-Twitter).
En Suisse aussi, les steaks végans dans le viseur
En Suisse, il existe aussi une affaire de nomenclature des faux steaks végans. En février, le Département de l'intérieur (DFI) a déposé un recours auprès du Tribunal fédéral, la plus haute autorité judiciaire du pays, contre une décision du tribunal administratif de Zurich ayant donné raison à l'entreprise Planted qui utilise les termes «poulet» ou «porc» pour ses produits végétaux.
(Fabien Goubet, avec AFP)