«Les réseaux, c’est pas la vraie vie». Cette phrase, on l’a toutes et tous entendue au moins une fois. Et si elle s’avère le plus souvent exacte, notamment lorsqu’il est question de la prétendue vie parfaite des influenceurs, il existe néanmoins un domaine où le virtuel concurrence le réel: les arnaque. Scams, chantage, escroquerie, les réseaux sociaux pullulent en effet de personnes mal intentionnées à la recherche de victimes plus ou moins naïves.
Ancien inspecteur de police judiciaire, François Nanchen officie depuis 2022 à la division Prévention de la criminalité de la Police cantonale vaudoise et réalise des contenus à destination des jeunes sur TikTok, Instagram et YouTube. Pour Blick, le premier eCop de Suisse romande détaille les cinq arnaques les plus répandues.
Arnaque aux petites annonces
En matière d’escroquerie sur les réseaux ou de cuisine, les recettes simples s’avèrent parfois les plus efficaces, à l’instar de la bonne vieille technique du faux vendeur sur les plateformes comme Facebook Marketplace: «C’est vraiment l’arnaque la plus bateau et pourtant c’est celle qui fonctionne le mieux. On voit une annonce qui nous intéresse, on paie en avance et bien sûr l’objet n’arrive jamais», explique François Nanchen.
Souvent, ces faux vendeurs demandent un paiement via Twint afin de mettre la victime en confiance: «Le but de la manœuvre est de l’amener à penser que comme Twint est une société suisse, il sera facile d’obtenir l’identité du prétendu vendeur en cas de problème mais malheureusement, il n’en est rien», prévient le policier qui met également en garde contre une autre technique visant à endormir la vigilance des victimes: «Il arrive aussi que le faux vendeur envoie une copie de sa carte d’identité. Bien sûr, ce n’est pas sienne, mais un document volé lors d’une précédente arnaque.»
Selon François Nanchen, le meilleur moyen d’éviter de se retrouver victime d’une telle arnaque reste encore de procéder à une remise en mains propres et dans un lieu public: «Même s’il existe bien entendu des vendeurs honnêtes, les risques de se faire avoir sont importants.»
Arnaque à l’avance de frais
Vendeurs, vous auriez tort de vous croire immunisés. En effet, lorsque vous souhaitez vous séparer d’une de vos possessions moyennant paiement, vous courez le risque de vous retrouver victime d’une arnaque à l’avance de frais. Le principe? un faux acheteur vous contacte pour vous faire part de son intérêt avant de vous réclamer toutes sortes de frais: «L’escroc demande au vendeur de lui envoyer l’objet par la Poste par le biais d’une société de transport et de payer les frais en avance. À cela s’ajoutent souvent des demandes de paiement de prétendus frais de douane, d’assurance, etc. Fréquemment, le faux acheteur envoie en outre au vendeur un lien vers un faux site de la Poste ou d’une société de transport, dans le but de lui voler les codes de sa carte de crédit, voire les accès de son e-banking.»
Comment se prémunir d’une telle arnaque? Le site internet votrepolice.ch vous donne des conseils lorsque vous souhaitez vendre des objets sur internet:
- Refuser de payer des frais à l’avance
- Cesser tout contact si la personne devient menaçante ou agressive
- Signaler la personne qui vous a contactée sur les réseaux sociaux ou les sites d’annonces
- Marquer les e-mails suspects comme spams
Arnaque à l’investissement
En vous baladant sur les réseaux, vous êtes certainement déjà tombés sur une publication ou une story au titre racoleur vous invitant à cliquer pour découvrir, au hasard, «Ce secret de trading qu’Alain Berset a révélé sans faire exprès et qui rend les banques furieuses!»
Lorsque la victime clique, elle est redirigée sur une page ressemblant à s’y méprendre au site d’un média de confiance contenant un lien vers la fameuse plateforme d’investissement qui aurait rendu l’ancien Conseiller Fédéral plus riche que Crésus: «Souvent, pour déstabiliser la victime et l’empêcher de trop réfléchir, les escrocs ajoutent un élément d’urgence en indiquant qu’il ne reste que quelques places disponibles pour profiter de cette incroyable opportunité de devenir très riche très vite», développe François Nanchen.
Une fois inscrite sur la prétendue plateforme d’investissement, la victime est contactée par une personne se faisant passer pour un conseiller financier. Pour la mettre en confiance, ce dernier lui conseillera d’abord d’investir des sommes modestes de l’ordre de 250 ou 500 francs. Dans un premier temps, la victime verra avec joie ses placements fructifier tandis que l’arnaqueur l’encouragera à effectuer des dépôts toujours plus importants.
La victime découvre le pot-aux-roses lorsqu’elle souhaite retirer l’argent investi et se voit alors signifier, sous couvert de prétextes bidons, l’impossibilité de lui transférer ce montant pour le moment. Parfois, les escrocs «promettent» de procéder au virement en échange d’un nouvel investissement.
Pour éviter de tomber dans le piège, François Nanchen conseille de faire preuve d’une grande méfiance si l’on est contacté par un prétendu conseiller financier sans avoir effectué de démarches en ce sens, mais aussi de toujours vérifier que la personne se présentant comme tel dispose d’une autorisation auprès de la FINMA.
Money muling et faux emplois
Comme le martèle eCop François dans ses vidéos: «Quand c’est trop beau, c’est faux!» Aussi, si vous tombez sur une offre d’emploi vous proposant de devenir «agent financier» sans compétences ni diplômes particuliers mais avec la promesse de commissions élevées, il s’agit très certainement d’une arnaque appelée “money muling” et pouvant vous conduire tout droit en prison.
L’objectif recherché par les malfaiteurs? Utiliser le compte en banque d’une «mule» afin d’y faire transiter des fonds issus d’activités illégales et ainsi en masquer la provenance criminelle. Dit autrement, blanchir de l’argent sale. «Typiquement, quand on paie sur Facebook Marketplace le dernier iPhone à 300 chf, on transfère l’argent sur le compte Twint d’une mule financière», explique François Nanchen avant de mettre en garde: «Dans ce cas de figure, la victime devient elle-même auteure de deux infractions graves: la complicité d’escroquerie et de blanchiment d’argent».
Particulièrement perverse, ce type d’arnaque vise le plus souvent les personnes précaires et les jeunes: «Mettez-vous à la place d’un jeune de 19 ans sans revenus: on lui propose un titre d’agent financier et de garder 10% de toutes les sommes qui transitent par son compte, ça fait rêver! C’est pour ça qu’on insiste tellement sur la prévention», conclut le eCop.
Chantage à caractère sexuel
Aussi appelé «sextorsion» (contraction de «sexe» et «extorsion»), cette pratique consiste à faire chanter une victime dans le but d’obtenir de l’argent ou des contenus à caractère sexuel.
Généralement, cette dernière se fait approcher sur les réseaux sociaux par une personne d’apparence séduisante qui va alors rapidement initier un jeu de séduction avant de proposer un appel vidéo qui sera enregistré à l’insu de la victime et durant lequel cette dernière sera encouragée à se dénuder ou à se masturber: «On a des ressorts psychologiques en rapport avec la pulsion sexuelle qui se mettent en place et qui expliquent qu’on ne va plus être en capacité de penser aux éventuelles conséquences», explique François Nanchen.
Une fois qu’elle s’est exécutée, la victime se voit alors réclamer de l’argent ou d’autres contenus du même genre avec la menace, en cas de refus, de divulguer la vidéo: «Les criminels vous mettent une pression absolue afin de vous faire paniquer et accepter de payer», indique le policier qui insiste une nouvelle fois sur la prévention, notamment chez les mineurs.
Si vous êtes victime de sextorsion, François Nanchen conseille enfin de ne jamais payer et de contacter la police.