L’intelligence artificielle (IA) est déjà partout: d’Alexa à Siri, de Google à ChatGPT, des milliers d’applications puisent dans le Big Data pour simplifier notre quotidien. Elles nous permettent de gagner du temps, et souvent, d'économiser de l'argent en accélérant des tâches chronophages ou en évitant des services coûteux. En dix exemples, voici ce que l’IA fait pour nous.
Vous accompagner sur les réseaux sociaux
De LinkedIn à Twitter et d'Instagram à TikTok, l'IA intervient en nous suggérant des contenus adaptés à nos préférences, à nos habitudes et à nos goûts. Un accélérateur important pour les entreprises qui peuvent de mieux en mieux cibler le public souhaité avec leurs communications et leurs publicités.
Régulièrement accusés d'accorder trop de place aux publicités et de survaloriser les opinions polémiques, les géants du web se servent aussi de l'IA pour automatiser la chasse aux fausses nouvelles, aux deepfakes et aux discours haineux. Sur Facebook, des IA prennent ainsi le relais d'une modération humaine dépassée par les milliards de contenus postés chaque jour. «Les géants du web fixent ces limites de façon parfois opaque», regrette Laura Tocmacov, directrice de la fondation genevoise impactIA. Pour résumer la problématique rapidement: est-ce à quelques acteurs de la Silicon Valley de définir ce qui peut se dire dans le monde?
Vous soigner
Suivi à distance des patients, prothèses intelligentes, compatibilité des traitements, opérations chirurgicales assistées, recherche de nouveaux médicaments: en matière de médecine, les IA s'améliorent constamment. Mais c'est sans doute dans le domaine de l'imagerie que les progrès sont les plus impressionnants.
Des outils comme Merative (ex-IBM Watson Health) utilisent l'IA pour analyser des images dans tous les domaines, de la dermatologie à l'ophtalmologie, en passant par la recherche de cancers. «Sans remplacer le médecin pour autant», souligne Katarzyna Wac, professeure d’informatique à l’Université de Genève et spécialiste de l’intelligence artificielle: «En comparant les examens d'un patient aux données stockées dans ses immenses bases de données, la machine peut détecter certaines anomalies très tôt, ce qui peut contribuer à un diagnostic précoce et à faciliter le choix du traitement.» Avec une limite: ses performances dépendent de la qualité des données exploitées. Quand l'échantillon qui a nourri le logiciel est incomplet ou peu représentatif, les recommandations de l'IA en souffriront.
Vérifier que vous avez le moral
C'est un domaine où on l'attend moins, et pourtant: l'IA s'intéresse aussi à votre bien-être au travers d'une longue liste d'applis comme Woebot, un agent conversationnel développé en lien avec des psychiatres et des scientifiques. Conçue comme un interlocuteur qui prend régulièrement de vos nouvelles, cette IA fonctionne particulièrement bien, selon Laura Tocmacov: «Au fil des semaines, le logiciel Woebot se nourrit des réponses aux questions qu'il vous pose et apprend à vous connaître. Il peut alors vous proposer toute une gamme d'exercices ou de conseils pour vous aider à vous détendre, à mieux dormir ou à gérer un pic de stress, au gré de votre humeur du moment.»
Gérer vos messages
Envoyer un SMS ou écrire un mail est de plus en plus simple grâce à l’aide contextuelle, à la saisie prédictive et aux correcteurs. Au-delà des messages automatisés qui permettent de répondre d'un seul geste, vos programmes ou applications peuvent finir vos phrases à votre place, vous rappeler d'ajouter un destinataire à votre message ou vous alerter sur le caractère trop familier d'un mot ou d'une expression.
«Qu'on parle de texte prédictif ou de correction automatique, tout repose sur du machine learning, explique la chercheuse Katarzyna Wac. Pour repérer une faute d’orthographe ou de grammaire, le logiciel s'entraîne sur des masses de textes et de données communes, mais apprend aussi de votre propre manière d’écrire.» Quant à la reconnaissance vocale, elle s’améliore aussi. À force de comparer des milliards d'heures d'enregistrements, l'IA vous permet de dicter vos messages de manière de plus en plus naturelle. Mais le plus grand apport de l'IA est invisible: Outlook, Google et les autres l'utilisent pour bloquer l'immense majorité des spams et des mails infectés ou frauduleux.
Écrire à votre place
Impossible d'avoir raté son nom ces derniers mois: en rédigeant à la demande des contenus sur tous les sujets possibles, ChatGPT est devenue la star des IA génératives, ces solutions capables de générer du texte, des lignes de code informatique, des images ou d'autres médias en réponse à une demande quelconque (les prompts). Au point de faire trembler les traducteurs, les codeurs, les enseignants et... les journalistes. ChatGPT est encore loin de pouvoir remplacer l'écriture humaine, estime pourtant Katarzyna Wac: «Il peut être utile pour rédiger des lignes de code ou certains contenus standardisés, mais il n'est pas créatif et n'a aucun style. ChatGPT est capable d'agglutiner des informations existantes, mais il ne sait ni les hiérarchiser, ni en tirer une synthèse originale. Il lui arrive même ‘d'halluciner’, c'est à dire d'inventer des faits.»
De quoi rassurer les enseignants sur leur faculté à repérer les dissertations rédigées par ChatGPT, comme ils avaient appris à repérer les copier-coller de Wikipédia. Utile, donc, à condition de s'en servir comme d'une base sur un sujet que vous maitrisez déjà, sans lui accorder une confiance aveugle. Mais le vrai danger de ChatGPT est ailleurs, précise la chercheuse: «Il ne faut jamais oublier qu'une IA générative reflète les biais de ses concepteurs, avec les éventuelles dérives que cela suppose.»
Traduire un texte
Traduire une page web d'un musée italien, déchiffrer la carte d'un restaurant de Tokyo, accéder à un long PDF dans sa langue natale, rédiger un email en espagnol ou en allemand sans en parler un mot... Toujours plus performants, les services de traduction instantanée que proposent (en partie) gratuitement des outils comme Google Translate ou Deepl suffisent à produire des textes avec un niveau de performance qui n'arrête pas de s'améliorer grâce au deep learning, une technique d'apprentissage machine qu'utilise par exemple l'IA de Google, Neural Machine Translation system (GNMT).
Sans pouvoir tout faire, évidemment: ces applications peinent encore pour traduire l’humour, les expressions familières, les métaphores ou les proverbes, le contexte ou le second degré.
Dessiner pour vous
C'est une application qui inquiète beaucoup les professionnels de l'image: MidJourney est pour l'heure la plus connue des IA dites «texte vers image». À partir de quelques indications, MidJourney produit en quelques secondes plusieurs images originales, avant de les affiner à la demande. Le résultat est souvent bluffant, la machine étant par exemple capable d'imiter le style d'un peintre ou de reproduire le grain de telle ancienne pellicule argentique. Idéal pour illustrer un exposé ou pour animer des jeux de société, mais aussi pour concevoir une campagne publicitaire ou pour décorer votre appartement sans débourser un centime.
Génial? Oui, à condition de garder certaines limites en tête, rappelle Laura Tocmacov: «Au-delà du fait que personne ne sait à qui appartiennent les droits de ces images, la qualité de la demande détermine celle de l'image.» D'où la vogue des «prompt engineers», ces experts qui assurent pouvoir tirer le meilleur de MidJourney grâce à des requêtes précises. Un métier sans beaucoup d'avenir, estime Laura Tocmacov: «Avec les progrès des IA conversationnelles, on s'adressera de plus en plus à MidJourney comme à une véritable personne, sans avoir besoin d'un intermédiaire. »
Améliorer vos photos
Quelle que soit la marque de votre smartphone, le logiciel qui traite votre dernière photo s’appuie sur une masse invraisemblable de données pour en améliorer automatiquement le rendu (contraste, luminosité, netteté, grain de la peau,...) tout en vous laissant la main sur d’autres outils comme les filtres Instagram ou d'autres outils de retouche.
De plus en plus faciles d'utilisation, ceux-ci permettent de supprimer d’un clic le détail qui vient gâcher l'image. Un résultat rendu possible par l'analyse des milliards d'images qui entraînent constamment les algorithmes.
Vous servir de copilote
Les voitures totalement autonomes ne sont pas tout à fait pour demain, mais l'IA a déjà pris la place du passager. Coyote, Waze, Apple Plans, Google Maps... Toutes ces applications de cartographie moulinent en permanence les données qui leur permettent d'ajuster votre parcours en fonction du trafic et des imprévus, jusqu'à prédire votre heure d'arrivée à la minute près.
Pour l'instant disponible uniquement dans quelques grandes villes, Live View (Google) permet de se situer dans les bâtiments publics - musées, gares, aéroports, centres commerciaux, etc. - avec toujours plus de précision. Le tout grâce à l'analyse de plusieurs milliards d'informations et de photos par les algorithmes nourris aussi par les contributions des usagers. Donc par vous!
Vous guider dans vos achats
Ce qui est valable sur Amazon ou sur n’importe quelle autre plateforme l’est aussi sur Spotify, sur AirBnB ou sur Netflix: les sites et les applications que nous consultons proposent constamment des services ou des produits complémentaires en exploitant ce qu’ils savent de nous. Et ils en savent beaucoup. D’une chanson qui pourrait nous plaire à notre prochaine destination de vacances, nous croulons sous des recommandations savamment calculées. Tout compte quand il s’agit de mesurer nos goûts, donc de prédire notre prochain achat.
«Tous ces paramètres comportementaux alimentent des bases de données et permettent de vous fournir des applications, des expériences ou des services de plus en plus personnalisés», explique Katarzyna Wac, en alertant sur le fait que le commerce de ces précieux renseignements ne se fait pas toujours de façon transparente.
En collaboration avec Large Network